Au Sénégal, un sort à la Socrate pour Sonko
La condamnation fantaisiste de Sonko vient créditer l’existence de ce qu’il conviendrait d’appeler la “Méthode Macky”.
Neuf morts, au moins; tout un pays délibérément débranché des réseaux sociaux; un film à feuilleton, au scénario tendu, qui promet des épisodes a priori sans limite.
Voilà les points saillants de la situation au #Sénégal, plus de 48 heures après la condamnation de l’opposant #Ousmane #Sonko à deux ans de prison ferme.
Et si l’on parlait de cette condamnation et de ce “sale” coton que file le président #Macky?
Eh bien, tout d’abord le ridicule aurait tué, si le ridicule tuait: La cour était saisie par le parquet pour statuer sur les chefs d’accusation de viol et menace de mort, tels que formellement et initialement portés contre l’opposant Sonko.
À l’examen des preuves, la Cour se rend compte que ces crimes—comme le clamait l’opposant—n’étaient pas constitués. Elle en acquitte le prévenu.
Dans toute procédure judiciaire, où seule la vérité compte, l’affaire se serait arrêtée là, et Ousmane Sonko aurait retrouvé sa relative tranquillité.
Mais, comme le soutenait l’intéressé depuis le début, la recherche de la vérité et le triomphe de la justice n’étaient, a priori, pas l’objet de cette procédure.
L’objet, disait-il, c’est de lui accoler un casier judiciaire raturé; le frapper d’inéligibilité à la présidentielle de l’année prochaine.
Ainsi, un boulevard serait offert à Macky Sall ou à son dauphin, si finalement il venait à renoncer lui-même à briguer ce troisième mandat controversé.
Mais comment obtenir l’inéligibilité de Sonko s’il n’est pas coupable des crimes de viol et de menace de mort que les preuves ne permettaient à la cour de valider?
La question est compliquée peut-être ailleurs; pas au Sénégal, visiblement. Et la Cour l’a démontré.
Comment?
Elle l’a démontré en adjoignant, de façon péremptoire, au dossier un chef d’accusation qui était absent au départ: le délit de “corruption de la jeunesse”.
À l’arrivée, elle statuera qu’en effet, il n’y a pas eu viol; il n’y a pas eu de menace de mort.
Mais qu’en revanche, sur la base de l’adjonction péremptoire de ce délit de corruption de la jeunesse, Ousmane Sonko, en entretenant des rapports avec son accusatrice—peu importe que ces rapports soient consensuels—aura incité la plaignante à la débauche.
Ainsi, comme Socrates—accusé de “corrompre la jeunesse d’Athènes” et condamné pour ce faire à boire la ciguë, à l’issue d’un procès bancal—Sonko est reconnu coupable d’un chef d’accusation hyper fantaisiste, tel que ce n’est imaginable que dans une république bananière.
Nous sommes tous d’accord que nul n’est au dessus de la Justice.
Mais peut-on parler de Justice dans un pays où l’on peut se faire condamner même pour ce dont on n’était pas formellement poursuivi?
Pour ceux qui préféraient attendre de voir, avant de s’assurer que l’affaire était bel et bien une cabale, il faut avouer que l’attente est terminée.
La condamnation fantaisiste de Sonko vient confirmer l’existence de ce qu’il conviendrait d’appeler la “Méthode Macky”;
une méthode consistant à instrumentaliser la justice pour éliminer toute opposition qui pourrait contrarier ses intérêts aux urnes.
Macky #Sall avait déjà déployé sa méthode deux fois:
Contre #Khalifa Sall—ancien maire de #Dakar; contre #Karim #Wade, ancien super-ministre et sion politique de la dynastie avortée des Wade.
Et maintenant, la “Méthode Macky”—comme un parachute, destiné à amortir les chocs d’un atterrissage—vient de se déployer pour la troisième fois.
Et ce sera peut-être la fois de trop. Peut-être, l’imposture cette fois-ci est trop énorme pour passer.
En tout état de cause, voilà un cas malheureux qui vient rappeler que ce qui empêche l’Afrique de décoller, ce n’est pas que les complots extérieurs.
Les premiers artisans du malheur africain sont ces dirigeants qui se prennent, à tort, pour d’éternels indispensables.
Convaincus qu’après eux, c’est le déluge, ils sont prêts à mettre leurs pays à feu et à sang, dans de mesquines tentatives visant à étouffer le renouvellement de leadership au sommet de l’Etat.
Que faire?
Il faut constater le forfait et se révolter. Et je souhaite du courage à tous les révoltés du Sénégal.
Dans leur élan contre ce job mal foutu, il est important de se rappeler que la vérité finit toujours par triompher.
Il y a eu le “sopi” avec Wade qui mit fin aux années Diouf.
Et quand Wade a voulu méprendre le fauteuil présidentiel pour un trône à transmettre à son fils, mal lui en prit.
Wade partira, dépité mais suffisamment à temps et a pu donc se sauver l’honneur. Et ainsi parti, il fait place à Macky Sall.
Et demain, de la présidence de Macky Sall la page tournera aussi.
Puisque telle est une loi inhérente à la marche des horloges—l’œuvre du temps, très impitoyable contre les entêtés.